L'INSUFFISANCE MITRALE : DIAGNOSTIC et PRISE EN CHARGE

 L'INSUFFISANCE MITRALE : DIAGNOSTIC et PRISE EN CHARGE

L'insuffisance mitrale est une affection caractérisée par une fuite de la valve mitrale, entraînant une régurgitation du sang du ventricule gauche (VG) vers l'oreillette gauche (OG) pendant la systole.

 Elle est souvent découverte de manière fortuite lors de l'auscultation d'un souffle ou suite à une complication. 

Le traitement curatif de cette pathologie est essentiellement chirurgical.

 

I – DIAGNOSTIC

A – Diagnostic positif

  1. Signes fonctionnels
    a. Insuffisance mitrale chronique : Initialement bien tolérée, elle peut évoluer avec l'apparition d'une dyspnée d'effort, d'un œdème aigu du poumon (OAP), d'une insuffisance ventriculaire gauche chronique, puis d'une insuffisance cardiaque globale.
    b. Insuffisance mitrale aiguë : Se manifeste par un OAP soudain, souvent associé à un syndrome de rupture de cordage, précédé de douleurs thoraciques.

  2. Examen clinique
    a. Palpation : Présence d'un choc de pointe dévié vers le bas et l'extérieur, parfois accompagné d'un frémissement systolique.
    b. Auscultation : Un souffle holosystolique de régurgitation est détectable, maximal à l'apex, irradiant vers les aisselles et le dos, et augmentant à l'inspiration. Le souffle est doux, semblable à un jet de vapeur.

    • Signes associés : présence d'un troisième bruit cardiaque (B3), roulement de débit mitral mésodiastolique, éclat du B2 au foyer pulmonaire en cas d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP).
      c. Autres examens : Écouter les deux temps pulmonaires pour détecter des râles crépitants, palper les pouls périphériques, rechercher des signes d'insuffisance ventriculaire droite et des foyers infectieux pour identifier une étiologie.
  3. ECG
    Peut être normal ou montrer des signes d'hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) et droite (HVD) dans les stades avancés, ainsi que des arythmies telles que la fibrillation auriculaire (ACFA).

  4. Examens paracliniques
    a. Radiographie thoracique : Détection d'une cardiomégalie (augmentation de l'index cardio-thoracique), dilatation de l'OG (avec débord de l'arc inférieur droit et de l'arc moyen gauche, aspect en double contour), signe de cavalier (angle inter-trachéo-bronchique > 90°), calcifications valvulaires et signes d'OAP.
    b. Échocardiographie transthoracique (ETT) et transœsophagienne (ETO) : Permet de confirmer le diagnostic, de quantifier la régurgitation et d'analyser l'appareil valvulaire mitral. Évalue également le retentissement et recherche des lésions associées.
    c. Cathétérisme et angiographie : Réalisés en cas d'angor ou chez les patients âgés pour rechercher une coronaropathie associée.

B – Diagnostic de gravité

  1. Signes de sévérité de l'insuffisance mitrale
    a. Signes fonctionnels : Présence de dyspnée.
    b. Auscultation : Détection d'un B3, roulement de débit mitral et éclat du B2 au foyer pulmonaire (indiquant une HTAP).
    c. ECG : Hypertrophie auriculaire gauche (HAG), HVG, et ACFA.
    d. Échographie : Dilatation importante du VG et de l'OG, altération de la fonction du VG, présence d'une HTAP.

  2. Complications

    • Endocardite infectieuse.
    • Troubles du rythme : ACFA.
    • Embolies systémiques.
    • Insuffisance cardiaque globale.

C – Diagnostic étiologique

  1. Insuffisance mitrale organique
    a. Rhumatisme articulaire aigu (RAA) : Cause la plus fréquente dans certains contextes.
    b. Prolapsus mitral : Associé à des maladies comme le syndrome de Marfan, la maladie de Barlow, le syndrome d'Ehlers-Danlos, ou la dégénérescence fibro-élastique chez les sujets âgés.
    c. Insuffisance mitrale ischémique : Aiguë (infarctus du myocarde avec rupture d'un pilier) ou chronique (par restriction du feuillet postérieur).
    d. Traumatique : Post-commissurotomie percutanée du rétrécissement mitral (RM).
    e. Infectieuse : Endocardite.
    f. Inflammatoire : Lupus, polyarthrite rhumatoïde.
    g. Congénitale.

  2. Insuffisance mitrale fonctionnelle
    Observée dans les cardiopathies ischémiques et dilatées, due à un remodelage du VG, provoquant un déplacement des piliers et une traction sur les cordages, entraînant une mauvaise coaptation des feuillets.

D – Diagnostic différentiel

Le diagnostic différentiel inclut le rétrécissement aortique, la cardiomyopathie obstructive, l'insuffisance tricuspidienne et la communication interventriculaire (CIV).

II – PRISE EN CHARGE

A – Moyens

  1. Traitement médical
    a. Règles hygiéno-diététiques : Régime pauvre en sel.
    b. Traitement d’une poussée d’insuffisance ventriculaire gauche (IVG) : Utilisation de diurétiques et de vasodilatateurs, traitement des troubles du rythme et des complications emboliques, antibiothérapie prophylactique avant tout acte pouvant provoquer une bactériémie.

  2. Traitement chirurgical
    a. Chirurgie conservatrice avec plastie mitrale : Indiquée lorsque l'anatomie des valves le permet, par exemple en cas de rupture de cordage, prolapsus valvulaire mitral avec excès de tissu, ou dilatation de l'anneau mitral.
    b. Remplacement valvulaire : Par prothèse mécanique ou biologique.

B – Indications

  • Traitement médical : Toujours nécessaire.
  • Insuffisance mitrale aiguë : Nécessite une chirurgie en urgence (plastie mitrale ou remplacement valvulaire) accompagnée d'un traitement étiologique.
  • Insuffisance mitrale chronique :
    a. Patients symptomatiques (classes III, IV) : Chirurgie recommandée, préférablement conservatrice si possible. Si les lésions sont trop importantes, le choix de la prothèse (biologique ou mécanique) dépend principalement de l'âge du patient et de la possibilité de traitement anticoagulant.
    b. Patients asymptomatiques ou peu symptomatiques : Chirurgie conservatrice proposée si l'insuffisance mitrale est volumineuse et si les risques opératoires sont faibles.


Le diagnostic d'insuffisance mitrale est souvent suspecté cliniquement lors de l'auscultation cardiaque et confirmé par échocardiographie. Cette pathologie comporte des complications potentiellement graves, et une prise en charge précoce est cruciale pour améliorer le pronostic des patients.

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